Vivre dans un éco quartier !
Salut ! C'est Igloo sur Topmusic.fr. Aujourd'hui nous recevons Emmanuel Marx, bonjour ! Bonjour ! Alors c'est précisément Cédric Simonin qui est en face de vous qui vous est invité parce qu'il avait très envie de parler écoquartier, c'est une de ses passions et comme vous êtes le directeur de l'association Éco quartier de Strasbourg il s’est dit, on va l'inviter pour parler de cette expérience de l’écoquartier et de tout ce qu'il y a autour. Cédric Simonin, bonjour ! Bonjour ! Plus précisément comment on vit dans un écoquartier c'était assez intéressant parce que les écoquartiers poussent depuis les années 2000 dans nos villes alors nouvel art de vivre ? Ghetto à Bobo ? Nouvel outil pour repenser la ville ? On va peut-être avoir nos réponses dans quelques instants donc merci Emmanuel Marx de nous éclairer surtout sur la notion d'usage parce que ça c'est assez intéressant. Mais avant pour que les gens comprennent ce que c'est qu'un écoquartier est-ce qu'on peut en donner une définition et quels sont les critères que l'on retrouve généralement dans cette notion d'écoquartier ? Alors en préambule je dois vous avouer que je ne suis pas un expert des écoquartiers je travaille dans une association qui s'appelle Éco quartier Strasbourg mais on est une association d'initiative citoyenne qui a porté cette notion d'écoquartiers dans les années 2000 à l'époque où elle n'était pas encore officielle, institutionnalisée comme un objectif d'un mouvement citoyen de répondre finalement aux objectifs du développement durable. Et avec le temps on est resté très connecté avec le sujet des écoquartiers on a des liens avec un certain nombre d'habitants dans les écoquartiers donc c'est de ce point de vue-là, de manière assez subjective, que je vais éclairer le sujet. Tout d'abord pour la définition de l'écoquartier en gros, pour moi c'est l'aboutissement, ou en tout cas les aboutissements ou les fruits d'un mouvement citoyen et institutionnel, l'un interagit avec l'autre, qui vise en fait à répondre à l'enjeu de vivre et d'habiter dans le respect du développement durable. C'est essentiellement cette définition, après il peut y avoir plein de critères qui se sont développés avec le temps, un label écoquartier a été développé par l'État et voilà maintenant on a confié ça à des ingénieurs des ponts et des mines donc ça me dépasse totalement donc voilà. Oui après il y a eu des critères qui étaient vraiment structurant ou structurés qui sont autour de la préservation du vivant, la biodiversité donc il y a une thématique comme ça assez large. Ça a évolué avec le temps aussi ! Mais on va le voir parce que ce qui est intéressant c'est la manière, moi ce qui m'intéressait aujourd'hui ce n’était pas le point de vue de l'élu parce qu'on aura peut-être des élus qui vont dire pourquoi un écoquartier mais ce qui m'intéresse c'est comment sont vécus les écoquartiers alors c'est assez récent d'ailleurs quand on a préparé l'émission j'imaginais que les écoquartiers existaient depuis plus longtemps que ça et l'émergence vient des années 2000. On en a vu dans toutes les régions de quasiment toutes les villes de France. Est-ce que ça répondait, est-ce que ça répond à un besoin particulier ? Il y avait un manquement initial avant ces écoquartiers par les gens qui veulent, entre guillemets, vivre la ville ou habiter la ville je ne sais pas comment on pourrait le dire ? Alors, rien que par l’existence de notre association Éco quartier Strasbourg, cette initiative citoyenne, ça a correspondu au fait que ces habitants n’ont pas trouvé de quoi répondre à leurs besoins, à leur désir d’habiter en ville, à l’époque dans les années 2000, ça correspond à ça. Il faut se dire quand même que ces enjeux de développement durable, les premières références en 1972, le club de Rome, halte à la croissance ou on commence à poser ce constat sur la limite de la surconsommation, de la surproduction. Le rapport à Brundtland en 87, 15 ans après qui pose la notion de développement durable. La notion de développement durable c’est simplement le fait qu’aujourd’hui on puisse, les générations d’aujourd’hui puissent répondre à leurs besoins sans compromettre les générations futurs à répondre aux leurs, voilà. C'était en 87, on est à peu près voilà, 35 ans plus tard donc dans les années 2000 c'est un petit peu logique que ces objectifs de développement durable s'appliquent enfin dans la manière de construire la ville. Elles l'ont été par les premiers mouvements citoyens qui ont poussé à ce que cette fabrication de la ville tienne mieux compte des objectifs environnementaux sociaux, du développement durable et ensuite ça a correspondu à un objectif de politique publique de se dire il faut développer encore de l'offre en logement, de l'offre en activité mais il faut le faire en cherchant à le faire le mieux possible dans un enjeu de préservation des ressources. Mais quel était selon vous, les éléments qui étaient manquants avant la naissance des écoquartiers que l'on retrouve dans ces écoquartiers, presque systématiquement ? Est-ce que, je donne quelques pistes, est-ce que c'est plus d'espace vert ? Est-ce que c'est le fait de pouvoir faire un peu d'agriculture, entre guillemets, urbaine au pied de chez soi ? C'était quoi les éléments premiers qui manquaient vraiment initialement et qu'on a retrouvé dans les écoquartiers au départ, qui ont sûrement évolué encore aujourd'hui ? Alors je pense que l'élément central c'était la préservation des ressources alors à préservation des ressources il y en a, on en utilise partout, la première ressource c’est le terrain, c'est le foncier donc il y a eu cet enjeu de à la fois dans les écoquartiers urbains mais aussi dans les cas les écoquartiers un peu plus ruraux parce que ça existe dans une diversité de paysages. Il y a eu le premier enjeu de se dire on va faire en sorte de construire plus d'habitats denses ou collectifs, voilà, pour simplement la préservation des terrains on commençais à se rendre compte que chaque 10 ans on consommais l'équivalent d'un département en urbanisation et que c'est pas du tout viable. Donc il y a eu ce premier mouvement de se dire on va construire mais on va construire de manière plus dense et donc il y avait la préservation du foncier, il y avait la préservation de l'acte de construire en gros c'est 80% de l'empreinte environnemental d'un bâtiment c'est au moment de la construction ce n’est pas dans son exploitation. Donc il y a eu un enjeu à chercher à réduire finalement l'utilisation des ressources dans l'acte de construire, l'habitat collectif est une manière. Le fait de développer plus de matériaux biosourcés en était une autre. Et il y avait également l'enjeu des ressources en eau donc il y a eu tout un travail sur la manière dont on pouvait réduire l'utilisation de l'eau ou la meilleure gestion de l'eau dans ces écoquartiers plus ensuite dans le temps long du quartier comment est-ce qu'on fait des bâtiments économes pour économiser l'énergie voilà on a bien fait de commencer à y penser à un moment ou un autre. Et pour aller un petit peu plus loin dans la question de Cédric en fait c'était une prise de conscience les écoquartiers, c'est une prise de conscience à un moment de l'histoire ? Comme dit c'est vraiment l'aboutissement d'un long fil de prise de conscience globale autour de l'enjeu de préservation des ressources. Alors les écoquartiers ont évolué parce qu’après on l'a dit, les élus et les services vous appelez comme ça, on commencés à mettre des critères plus structurants. On a parfois l'impression que c'est un peu une liste à la Prévert quand je vois ce que l'on nous propose qui parfois semble manquer un peu de sens qui peut-être été le sens initial de l'écoquartier. Mais au-delà de ça est-ce qu'on peut dire qu'avec votre tour sur l'usage est-ce qu'on vit mieux dans un écoquartier ? Alors est-ce qu'on vit mieux dans un écoquartier la question est assez délicate à répondre il y a une diversité comme je le disais d’écoquartier en France et au final nous les retours qu'on envoie dans les écoquartiers, on connaît beaucoup plus les écoquartiers alsaciens et strasbourgeois, il y a une forme d'ambivalence finalement dans les retours qui nous viennent à nos oreilles. L'ambivalence qui vient notamment du fait de la plupart en fait la majorité des personnes apprécient la place donnée aux mobilité douce dans les écoquartiers, il y a beaucoup d'espaces piétons de pistes cyclables mais en même temps il se plaignent des difficultés stationnement pour leur véhicule motorisés, c’est le premier exemple qui vient vraiment systématiquement. Il paraît qu’il y en a qui ne font même pas le tri, non je plaisante. Et le deuxième exemple qui s'exprime souvent c'est le confort thermique le plaisir est dans un bâtiment qui a un confort thermique et qui est économe mais de l'autre côté ils se plaignent très souvent des problèmes d'insonorisation entre les logements. Forcément quand on se sur isole de l'extérieur et qu'on reporte les véhicules motorisés à l'extérieur et ben c'est beaucoup plus calme à l'intérieur et on commence beaucoup plus à entendre ses voisins. La dernière ça peut être aussi le côté finalement, avoir ces facilités de mobilité, les transports en commun, les espaces piétons à proximité mais par contre ça ne fonctionne que s'il y a une forme de densité humaine et donc des vis-à-vis parfois qui sont assez difficiles à vivre on voit qu'il y a eu vraiment une corrélation entre la proximité des vis-à-vis et la satisfaction de tes personnes ont dans leur logement voilà. Alors je l'ai dit un peu de manière un peu provocante « ghetto à Bobo » on l'entend souvent ça pour les écoquartiers, est-ce que les gens qui viennent vivre les écoquartiers c'est monsieur et madame tout le monde c'est tous les univers sociaux ? Ou est-ce qu'il y a vraiment une typologie de gens qui ont une philosophie de vie particulière ? Alors un des objectifs des écoquartiers c'était répondre un peu, on va dire au développement durable dans le développement durable il y a à la fois la question de la protection de l'environnement il y a aussi la question du développement économique et celui de la question du développement social donc la partie social n'a pas été oubliée dans les écoquartiers, malheureusement / heureusement je peux pas vous le dire c'est pas un jugement mais ça s'est souvent réduit sous la forme du quota de logements social et par contre les ambitions en termes de présence de logement social sont allés généralement plus loin que ce qui existait dans le reste des autres développements urbains. On a à l'écoquartier Danube, on a 50% de logements social. Donc oui il y a de la diversité sociale, oui ce n’est pas forcément simple de vivre la diversité parce que c'est beaucoup plus simple quand chaque culture, chaque population et loin les unes des autres parce qu'il y a moins de friction donc la densité crée aussi un enjeu à réussir à dépasser les frictions qui sont provoquées par la mixité des cultures, par la mixité sociale. Et ça malheureusement le côté, cet objectif de diversité des populations et diversités des ressources elle a été réussie par contre l'enjeu de se dire comment est-ce qu'on arrive à créer du lien social en poussant les gens à habiter plus les uns proches des autres c'est plus compliqué parce que ça demande une ingénierie qui elle ça ne se met pas dans une case à cocher, on a dit c'est bon ça on a fait, ça nécessite une présence un soin donné à l'enjeu relationnel. On a essayé dans certains écoquartiers qui a pu fonctionner de promouvoir des espaces partagés, ce qui fonctionne aussi bien c'est il y a une sur-représentation des habitats participatifs dans les écoquartiers comme en Allemagne ça se retrouve, et dans ses habitats sportifs il y a souvent des personnes qui sont un peu plus engagées dans la transition écologique et qui vont être plus porteurs d'initiatives de jardins partagés, de poulaillers, de végétalisation des pieds de l'immeubles et c'est des occasions de socialiser et des occasions de créer des espaces on va dire de rencontre des dialogues ça c'est quand même assez favorable mais ça nécessite quelqu'un pour les porter. Il vous faut toujours des leaders dans chaque écoquartier pour pousser les initiatives et puis pas qu’elles meurent petit à petit avec le tout le monde qui est repris par son quotidien. Du vivre ensemble en fait. Du vivre ensemble ! Cette expression qui… On n’est pas tous égaux par rapport à nos facilités de produire des initiatives qui permettent des rencontres donc effectivement on peut les appeler des leaders, on peut on peut parler de personnes qui ont plus aussi une propension à aller les uns vers les autres il en faut heureusement qu'il en faut. Et ça ce n’est pas propre aux écoquartiers. Et ça c'est pas propre aux écoquartiers mais c'est vrai qu'il y a une petite sur-représentation comme il y avait ces ambitions de développement durable et de protection de l'environnement ça a attiré aussi une population qui était plus sensible à ce type de discours, à ce type d'objectif et au final le fait d'avoir une population assez voilà, assez sur-représentée même si ça reste minoritaire, bah ça aide à développer on va dire des initiatives qui aident à la rencontre et qui a doit au partage. Alors on l'a dit les écoquartiers existent depuis 20 ans, avez-vous le sentiment que les attentes des habitants ont changé depuis 20 ans ? Et est-ce que vous vous verriez faire évoluer le cahier des charges initialement prévu entre guillemets ? Aujourd'hui j'ai l'impression qu'on parle d'écoquartier, des futurs écoquartiers j'ai l'impression qu'on parle de quartier bas carbone parce que le carbone est devenu THE sujet. On cherche toujours à avoir un élément on va dire réducteur qui permet de parler plus facilement d'un objet il est clair que même s'il y a une prise de conscience qui s'est, on va dire un peu plus généralisé dans la population, ça reste quand même pas j'ai l'impression une prise de conscience et ça n'a pas produit encore un engagement dans la majorité de transformation des modes de vie, des modes d'habitat dans l'ensemble de la population donc il y a eu une diffusion mais elle ne touche pas, je pense encore la majorité, donc beaucoup de personnes subissent encore un petit peu ces difficultés à découvrir les modes de fonctionnement dans un écoquartier de la proximité, de ces questions de mobilité de stationnement. Est-ce que les attentes ont évolués ? Dur à dire. Pour celles et ceux qui vont dans un écoquartier parce qu'ils recherchent habiter dans un écoquartier je ne pense pas que leur attente aient évolués, j'en ai pas l'impression mais j'ai pas non plus ce recul-là maintenant il y a une majorité des personnes qui arrivent dans un écoquartier notamment dans le logement social sans l'avoir demandé c'est juste parce qu'ils ont demandé un logement social et là l'enjeu de transformation il se fait pas par rapport, on va dire à des besoins qui seraient insatisfaits mais il se fait plus dans la capacité à accompagner ces nouveaux modes de vie qui sont forcément, qui amènent plus de friction, plus de tension mais qui sont d'une certaine manière assez nécessaire pour tenir compte des défis qui sont devant nous. Il y a une fierté à habiter dans un écoquartier ? Pour celles et ceux qui en ont fait la demande et je pense qu'il y a une fierté à habiter dans un écoquartier c'est une notion qui a une valeur, les immeubles sont modernes ils sont économes il y a une valorisation, de voilà, de son image à habiter je pense dans son écoquartier et en plus il y a des avantages très pécuniers. Ça coûte peut-être plus cher quand on veut y investir par contre les bâtiments sont clairement plus économes. Et l'évolution, le modèle suivant de quartier ça sera un quoi d'après vous ? Ça dépend beaucoup des territoires, aujourd'hui ce qui ce qui va arriver c'est la loi zéro artificialisation nette qui va bloquer les extensions enfin il ne va pas bloquer les extensions urbaines mais pour continuer à construire il va falloir compenser par le fait de redonner des terrains à la nature donc ça, ça amène encore plus d'enjeux de construire dans une certaine densité. Et l'enjeu de l'adhésion à cette densité au logement collectif c'est un enjeu, finalement je pense qu'on maîtrise pas encore assez bien, alors même qu'on a des retours d'expérience enrichissant mais ça voudrait dire prendre plus de temps à tirer parti des apprentissages, des enseignements de ces écoquartiers pour voir de quelle manière ça nous aiguilles et tous ces travails de réflexivité, j'ai pas le sentiment non plus, qu'on se donne le temps malheureusement pour savoir comment est-ce qu'on rebondit sur ces expériences qui forcément nous éclairent pour la suite. Mais demain je pense que les quartier bas carbone qui vont sortir, on continuera à être dans cette idée de chercher le plus possible, la réduction de l'empreinte carbone des personnes donc on va aller de plus en plus loin dans la technique, dans l'enjeu de changement des comportements j'ai un peu la crainte que on va créer plus de tension que ce qu'on amènera… C’est la crainte mais voilà. En tout cas nous on va suivre ça de très près dans Igloo, évidemment. Merci Cédric Simonin. Merci ! Merci Emmanuel Marx, on rappelle que vous êtes le directeur de l'association Eco quartier Strasbourg. Igloo c'est sur topmusic.fr, sur Facebook Igloo on Air, sur toutes les plateformes de podcast et sur la chaîne YouTube d'Igloo à bientôt, salut ! Salut ! Au revoir !